Alice
Mon amie Alice, est la personne la plus positive et la plus optimiste de mon entourage. Quand on ne la connaît pas, il est difficile de croire qu’elle a affronté non pas un, ni deux mais trois cancers.
Elle trouve que son histoire ne vaut pas la peine d’être racontée. Ce serait un peu prétentieux m’a-t-elle dit.
Moi, je pense le contraire.
Je connais Alice depuis la maternelle. Mais nous n’avions jamais vraiment pris le temps de discuter de son parcours en profondeur. La part de curiosité qui est en moi ne pouvait m’empêcher de me demander comment elle en était arrivée là et surtout comment fait-elle pour toujours voir le verre à moitié plein après tout ce qu’elle a traversé.
A seize ans, notre plus gros souci était de savoir si on allait réussir notre contrôle de maths. Mais pour Alice, la vie en a décidé autrement. Physiquement, elle a le corps d’une femme enceinte de neuf mois et elle a du mal à respirer. Elle sait que ce n’est pas possible. Mais des médecins mettent sa parole en doute. Jusqu’au jour où un examen révèle qu’elle a une tumeur de neuf kilos à l’ovaire.
Pour elle, le plus délicat, c’est de devoir se raser la tête parce qu’elle perd trop de cheveux à cause de la chimiothérapie. Elle ne met pas sa perruque car c’est inconfortable, ça gratte. Mais quand elle repense à cette période, ce qu’elle en retient surtout, c’est qu’elle avait un corps de déesse suite à une perte de poids fulgurante et qu’elle a réussi son année scolaire sans devoir passer ses examens. Le verre à moitié plein, je vous l’avais dit.
Si elle n’en parle pas, personne ne peut le voir. Mais à dix-huit ans, elle fait une récidive. Les traitements lui font de nouveau perdre ses cheveux. Elle a commencé ses études supérieures mais elle a plus le cœur à faire la fête qu’à étudier. Cette période sera marquée par une relation très spéciale avec Jonathan, son âme-sœur. Une relation amicale tellement intense que peu de personnes peuvent la comprendre.
A vingt ans, elle a envie d’un peu plus de sérieux et entreprend de nouvelles études. Mais la maladie la touche une troisième fois, le rein cette fois-ci. Passer par la chambre stérile est inévitable. Si elle avait su avant ce que c’était, elle n’y serait jamais allée. C’est pour elle, la période la plus difficile. Ça fait mal, c’est long, dégradant et elle perd la tête. Mais ça l’a sauvée. Elle perd à nouveau ses cheveux, mais elle a une nouvelle perruque plus confortable et vraiment belle.
Aujourd’hui Alice est totalement guérie. Elle a bien sûr quelques séquelles qui ont un impact sur sa santé, sa féminité et sa vie de couple. Mais quand je la regarde, ce que je vois, c’est une femme inspirante, épanouie, généreuse qui a toujours le sourire et qui adore rire. Elle a su transformer ses problèmes en une force qui est contagieuse. Pour elle, il n’y a pas de problèmes, que des solutions. Elle est persuadée que si les gens étaient plus optimistes, le taux de mortalité lié à un cancer diminuerait.
Elle ne me l’a pas vraiment formulé ainsi mais je sens, quand elle parle de ses parents, de son frère et de son ami Jonathan qu’elle leur est éternellement reconnaissante pour le soutien sans faille dont ils ont fait preuve. Elle a été traitée comme une princesse et elle a adoré ça.
Après tout qui n’aimerait pas ?
Alice n’a jamais eu peur de la mort. La peur, ça nous met des barrières m’a-t-elle dit. Elle serait triste de partir mais pour la seule et unique raison qu’elle aime la vie.
Alors …
Longue et belle vie ma belle Alice.
Tata Mackintosh
P.S. : Alice, ce message est pour toi. Sache que je suis extrêmement fière de t’avoir comme amie. Et très heureuse qu’en plus, tu sois ma voisine. Dans 50 ans, j’aurai les cheveux blancs et toi, tu auras un sonotone. Mais une chose n’aura pas changé, notre amitié. Love you. Ta Tata d’amour.